L’arme mortelle n’est pas celle que l’on pense.
Le 31 mai, après des semaines de négociations compliquées par des exemptions réclamées par certains pays, comme la Hongrie de Viktor Orbán, les membres de l’Union européenne ont finalement accepté d’imposer un embargo massif sur le pétrole russe.
Réclamé haut et fort par l’Ukraine, qui y voit l’un des moyens les plus efficaces pour vider les finances de Moscou et stopper financièrement sa machine de guerre, cet embargo risque de ne pas avoir tout à fait l’effet escompté — et de le compliquer davantage, comme l’a noté Joe Biden, secrétaire du Trésor, Janet Yellen, la situation économique globale.
La Russie ayant déjà largement détourné ses flux pétroliers vers d’autres pays, ravie de pouvoir acheter du pétrole russe bon marché sur lequel ils ne cracheront pas : l’Inde et la Chine, notamment, ont déjà largement remplacé les autres clients de longue date qui se détournent désormais du brut de l’Oural. .
« Un embargo européen sur le brut, ne serait-ce que cela, ne fera en fait que prolonger les chaînes d’approvisionnement », a récemment confié au Wall Street Journal Alan Gelder, un analyste de Wood Mackenzie. Mais justement : l’embargo européen ne consiste pas seulement à stopper les importations depuis le continent de pétrole brut russe.
Un certain manque de confiance
Le texte adopté par les membres de l’UE cache la sanction qui, plus que l’embargo, pourrait nuire durablement aux exportations de pétrole de l’Oural – et donc aux finances de Moscou : l’interdiction faite aux compagnies d’assurance et de réassurance pour les compagnies européennes, en association avec leurs homologues britanniques, de signer contrats avec les compagnies dont les navires transportent du pétrole russe.
Car, comme l’a récemment expliqué Reuters, ces polices d’assurance sont extrêmement coûteuses et obligatoires pour tout navire transportant du pétrole d’un point du monde à un autre. Cependant, les compagnies d’assurance, comme les compagnies de réassurance, sont presque exclusivement occidentales.
Donc, en définitive, c’est tout le flux mondial de pétrole russe qui peut être affecté par la décision de l’Union européenne. Selon Reuters, la Russie pourrait essayer d’assurer les navires transportant son pétrole brut auprès de compagnies d’assurance locales ou d’autres pays qui n’ont pas imposé de sanctions spécifiques au pays.
Mais ces entreprises ne sont généralement pas assez solides pour des contrats aussi importants. Quant à la réassurance, essentielle pour les compagnies d’assurance, elle doit sans doute s’appuyer sur le bon vouloir des États souverains, qui doivent garantir financièrement la sécurité desdits pétroliers.
Rien d’impossible à tout cela en théorie, bien sûr. Mais ces complications majeures devraient limiter la capacité de la Russie à exporter dans une large mesure son pétrole, et assècheraient quelque peu les finances de Moscou.
Malheureusement, il y a un revers à la médaille : alors que les pays de l’OPEP envisagent d’augmenter leur production pour pallier le manque de pétrole russe dans les flux mondiaux, tout cela pourrait faire grimper un peu plus les prix à court terme. alimentant une inflation qui continue de battre des records, tant en Europe qu’ailleurs.
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