En réponse au refus des pays de l’Opep+ de s’aligner sur les demandes de production pétrolière de Washington, plusieurs élus démocrates appellent à des sanctions contre Riyad. Un projet de loi anti-OPEP apparaît au Congrès.
« Il y aura des conséquences pour ce qu’ils ont fait à la Russie », a averti le président américain Joe Biden le 12 octobre. CNN, interrogé sur l’avenir des relations entre les États-Unis et l’Arabie saoudite. « Compte tenu des événements récents et des décisions de l’OPEP+, le président estime que nous devrions réévaluer la relation bilatérale avec l’Arabie saoudite » admis la veille John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, sur la chaîne d’information en continu américaine. Un « réexamen » diplomatique, qui sera confirmé à la presse par la porte-parole de la présidence, Karine Jean Pierre.
La semaine dernière, la pression a doublé à Washington pour « punir » Riyad. Il s’agit de la décision prise le 5 octobre par les vingt-trois pays de l’Opep+, dont Riyad est un élément central, de réduire leurs quotas journaliers de production de pétrole. Une décision visant à « stabiliser le marché » avait été annoncée à la presse par le ministre saoudien de l’Energie Abdel Aziz bin Salman dans la foulée de cette rencontre.
A quelques jours de l’annonce de cette décision par le cartel et ses alliés, le baril de Brent continuait de descendre sous les 85 dollars, son plus bas niveau depuis janvier.
Un argument économique que n’entendent pas les Américains qui, au contraire, demandent depuis plusieurs mois à Riyad de stimuler une augmentation de la production du cartel. Objectif : casser les prix mondiaux pour faire baisser les factures énergétiques des ménages et entreprises américains confrontés à une forte inflation tout en réduisant les revenus de la Russie. Aux yeux des Américains, en allant à l’encontre de cette consigne de la Maison Blanche, Riyad se serait rangé du côté de Moscou.
Plusieurs pistes à l’étude vers Riyad. punir
Dès le mois d’août, l’annonce par l’Opep+ d’une augmentation terrifiante de la production journalière avait été accueillie comme une « insulte » au président américain. Résultat : à moins d’un mois d’élections législatives capitales à la majorité démocrate au Congrès, les élus montent au créneau.
« Il est temps que notre politique étrangère envisage un monde sans leur alliance », a déclaré Dick Durbin dans un tweet peu après l’annonce du cartel. Aux yeux du No. 2 Sénateurs démocrates, « La famille royale saoudienne n’a jamais été un allié fiable de notre nation »
Des questions sans réponse sur le 11 septembre et l’assassinat de Jamal Khashoggi, à la conspiration avec Poutine pour punir les États-Unis avec des prix du pétrole plus élevés, la famille royale saoudienne n’a jamais été un allié fiable pour notre nation. Il est temps que notre politique étrangère envisage un monde sans leur alliance.
— Le sénateur Dick Durbin (@SenatorDurbin) 6 octobre 2022
« Ils ont choisi de soutenir les Russes, de faire grimper les prix du pétrole, ce qui pourrait avoir le potentiel de briser notre coalition ukrainienne et il doit y avoir des conséquences ! » estimé le 9 octobre le CNN Le sénateur Chris Murphy, membre de la commission des relations étrangères du Sénat américain. « Pendant des années, nous avons fermé les yeux lorsque l’Arabie saoudite a massacré les journalistes engagés dans la répression politique de masse pour une raison : nous voulions croire que quand les choses allaient mal, quand il y avait une crise mondiale, les Saoudiens nous diraient qu’ils préféreraient la Russie », s’exclame le sénateur, en poursuivant : « Eh bien, ils ne l’ont pas fait. Ils ont choisi la Russie.
Chris Murphy avance plusieurs pistes pour punir Riyad, comme le retrait des troupes américaines protégeant les infrastructures du royaume wahhabite. Une piste déjà exploitée par trois élus démocrates à la Chambre qui ont présenté le 6 octobre un projet de loi visant à retirer les systèmes militaires et antimissiles américains du sol saoudien et émirati. Une réactivité principalement due au fait que cette initiative législative s’inspire de celle des Républicains en 2020, à la différence qu’il s’agissait alors d’obliger les membres de l’Opep+ à réduire la production afin de sauver la rentabilité des énergéticiens américains.
Vers un renforcement de l’extraterritorialité américaine ?
Autres morceaux de Chris Murphy : Réduction des fournitures d’armes à l’Arabie saoudite. Ce dernier est le principal client à l’exportation du complexe militaro-industriel américain. Ainsi, selon le Stockholm International Peace Research Institute, Riyad représentait 24 % des exportations d’armes américaines entre 2016 et 2020. Boulimie d’armes, accentuée par le conflit au Yémen, où une coalition dirigée par Riyad – soutenue par Washington et Paris – intervient militairement en soutien aux forces gouvernementales opposées aux rebelles houthis.
Enfin, le sénateur démocrate brandit la menace de lever l’immunité judiciaire dont jouissent l’OPEP, ses États membres et leurs compagnies pétrolières nationales aux États-Unis. Un hic de la loi antitrust américaine, dénoncée depuis des décennies mais entretenue par Washington pour épargner Riyad. Cependant, une autre salve législative pour Joe Biden est en préparation, avec l’approbation par la commission judiciaire du Sénat d’une nouvelle version du projet de loi No Oil Producing or Exporting Cartels (NOPEC) en mai dernier.
Si ce texte anti-Opep, qui refait surface régulièrement, était voté par les deux chambres et que Joe Biden n’y mettait pas son veto, les procureurs américains pourraient poursuivre l’Opep et les Etats producteurs de pétrole pour collusion. Ainsi, des États comme l’Arabie saoudite, l’Algérie ou la Russie pourraient être poursuivis devant les tribunaux fédéraux lorsque leurs politiques ne le font pas, finalcoïncidait avec les intérêts américains.
Maxime Perrotin
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