Elles sont à l’origine de déforestations massives.
Quel est le meilleur indicateur du danger qui plane sur une forêt tropicale? Le nombre de routes qui la traversent. Et si ces routes ne figurent sur aucune carte, c’est encore moins bon signe. Des chercheurs tentent de référencer ces voies qui morcellent les espaces naturels et alarment sur ce qui ressemble au premier symptôme d’un véritable cancer menaçant les forêts d’Asie-Pacifique, comme l’explique un article de The Conversation.
Le Pr. Bill Laurance et son doctorant Jayden E. Engert, au Centre for Tropical Environmental and Sustainability Science de l’université James-Cook à Cairns en Australie, ont publié une étude recensant les routes non-répertoriées –ou «routes fantômes»– des forêts tropicales d’Indonésie, de Malaisie et de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Les chercheurs sont parvenus à établir une corrélation entre ce réseau non contrôlé de voies et la déforestation que subit cette région.
Pour se doter de solides données, les chercheurs ont fait appel à 200 volontaires recrutés en Australie et en Indonésie. Au total, 7.000 heures ont été consacrées à l’étude de photos satellite fournies par Google Earth. 1,4 million de kilomètres-carrés ont ainsi été passés au peigne fin pour y dessiner le réseau routier réel.
Ce réseau s’avère bien plus dense que celui, officiel, recensé par le Global Roads Inventory project ou par OpenStreetMap, le projet open source de cartographie. Les chercheurs estiment que la proportion de «ghost roads» est 3 à 6,6 fois supérieure à celle du réseau cartographié. C’est ici, dans cette zone où la biodiversité est si riche, que se développent les routes avec le rythme le plus soutenu dans le monde, estime Bill Laurance.
De l’huile de palme par camions entiers
Ces routes fantômes, ignorées jusqu’ici par la cartographie «officielle», sont celles qu’utilisent les différents exploitants de la forêt tropicale. C’est par exemple par là qu’est volé le bois, en dehors de toute concession. Plus d’un tiers de ces voies servent également aux exploitants d’huile de palme.
Ces pratiques rendues possibles par le maillage routier contribuent à la déforestation de la région. Les routes officieuses constituent même selon les auteurs le point de départ de toute destruction de forêt: la déforestation est extrêmement forte dès qu’une première voie est ouverte dans une nouvelle zone, puis ralentit avec la densification du réseau.
Ces forêts d’Asie-Pacifique abritent une précieuse biodiversité et comptent parmi les enjeux listés lors de l’Accord de Paris sur le climat en 2015. Certaines zones sont protégées et ce statut permet d’observer une division par trois du nombre de routes fantômes. On a donc une réponse, il faut juste se donner les moyens de la mettre en œuvre.
On savait que certaines routes n’existaient que sur Google Maps, on découvre maintenant que des chemins forestiers non recensés sont utilisés essentiellement pour des activités illégales. Un scientifique brésilien, Eneas Salati, affirme que «la meilleure chose que vous puissiez faire pour la forêt amazonienne est de faire sauter toutes les routes». Il ne pensait pas si bien dire.
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