Des experts craignent un retour de la Guerre froide.
Vous avez probablement déjà entendu parler de la crise des euromissiles. À partir de 1977, le déploiement d’ogives nucléaires soviétiques de moyenne portée SS-20 avait fait flamber les tensions Est-Ouest. En réponse, les États-Unis avaient installé à leur tour, en 1983, des missiles nucléaires (notamment des Pershing-II) dans cinq pays européens, ce qui avait déclenché une vague de contestation des pacifistes européens –avec parfois un coup de pouce du KGB.
La crise s’était heureusement conclue pacifiquement par la signature du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), en 1987. Ce scénario est-il en train de se reproduire en Europe? Oui, selon plusieurs experts interrogés par le média en ligne américain Business Insider.
«Nous avons recréé l’une des composantes les plus dangereuses de la Guerre froide en Europe et les choses ne feront qu’empirer à partir de maintenant», a prévenu sur X (anciennement Twitter) Jon B. Wolfsthal, expert en contrôle et en non-prolifération des armements nucléaires, ancien responsable des affaires de sécurité nationale de l’administration Obama.
The US is moving to deploy intermediate range missiles in Europe after Russia’s violation of the INF Treaty banning these systems. We have recreated one of the most dangerous components of the cold war in Europe and things will only get worse from here. https://t.co/gB0idmFuSK
— Jon B. Wolfsthal 🟦🇨🇿 (@JBWolfsthal) July 10, 2024
Le 10 juillet, lors du sommet de l’OTAN à Washington, les États-Unis de Joe Biden ont en effet annoncé leur intention de stationner en Allemagne des armes à longue portée (SM-6, Tomahawk), ainsi que des projectiles hypersoniques. Peu après, la France, l’Allemagne, la Pologne et l’Italie ont officialisé le projet de développer conjointement de nouveaux missiles de croisière dépassant les 500 kilomètres de portée.
La réaction de la Russie ne s’est pas fait attendre. «Il s’agit d’une menace très sérieuse pour la sécurité nationale de notre pays [qui] exigera […] des réponses […] pour dissuader et contrecarrer l’OTAN», a réagi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, le 11 juillet. Deux jours plus tard, il en remettait une couche: «L’Europe est une cible pour nos missiles, notre pays est une cible pour les missiles américains en Europe. […] Nous avons la capacité de contenir ces missiles, mais les victimes potentielles [d’une riposte russe, ndlr] sont les capitales de ces pays européens.»
«Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette»
Certes, la Russie paie en partie sa remise en cause du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire, qui avait conduit les États-Unis à en sortir sous le mandat de Donald Trump et ainsi amené à l’extinction du traité, officiellement en août 2019.
«Je dis depuis longtemps que les Russes regretteront la violation du traité FNI de 1987 par Vladimir Poutine, analyse sur le réseau social X Jeffrey Lewis, professeur à l’Institut Middlebury d’études internationales à Monterey (Californie) et expert en prolifération nucléaire. Il a ouvert la porte à des déploiements importants de missiles conventionnels précis et à longue portée, en Allemagne et ailleurs.»
I have long said that Russians will come to regret Putin’s violation of the 1987 INF Treaty. He opened the door to significant deployments of accurate, long-range conventional missiles in Germany and elsewhere.https://t.co/2nDf3WjGmX
— Dr. Jeffrey Lewis (@ArmsControlWonk) July 11, 2024
Mais, même si ce déploiement constitue une réponse au comportement agressif et expansionniste de Moscou et que les missiles en question ne sont pas nucléaires, le risque d’escalade est réel.
«Il y a un élément de pilote automatique dans cette dynamique, parce que chaque partie utilise les actes de l’autre pour justifier de plus en plus de mesures visant à renforcer ses capacités militaires», avertit Hans Møller Kristensen, directeur du projet d’information nucléaire à la Fédération des scientifiques américains.
En effet, dans une logique de «œil pour œil, dent pour dent», la Russie devrait logiquement pointer à son tour des missiles longue portée vers l’Europe. Faut-il retirer des minutes supplémentaires à l’horloge de la fin du monde?
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