Les autorités danoises doivent assister des pétroliers russes vétustes et aux comportements dangereux. Et ce, afin d’éviter une catastrophe environnementale.
Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, une flotte de pétroliers vieillissants et mal entretenus, surnommée la «flotte fantôme» ou la «flotte de l’ombre», joue un rôle primordial dans l’exportation du pétrole russe vers des marchés comme la Chine et l’Inde qui, contrairement aux pays occidentaux,’ n’imposent aucun embargo à Moscou. Ces bateaux, qui traversent régulièrement les eaux danoises, naviguent souvent sous des pavillons de complaisance.
Les propriétaires sont donc cachés derrière des structures opaques, ce qui les rend difficilement identifiables. L’agence de presse américaine Bloomberg révèle que cette situation est doublement très inquiétante, sur le plan de la sécurité maritime et sur celui de la protection de l’environnement.
Mikael Pedersen, un pilote de navire danois travaillant pour DanPilot, une entreprise publique danoise, aide ces pétroliers à naviguer dans les détroits étroits et difficiles du pays. Il décrit des bâtiments dans des états désastreux, dont les équipements s’avèrent obsolètes, les cartes inexactes, les équipages mal formés et les conditions de vie déplorables. Surtout, le comportement de ces navires vétustes est souvent imprévisible, certains désactivant même leurs équipements de sécurité pour éviter d’être repérés.
Alors qu’ils étaient quasiment absent de la mer Baltique au début de l’année 2022, les pétroliers russes y sont dorénavant très nombreux. Depuis le 24 février 2022, pas moins de 230 pétroliers de la «flotte fantôme» l’ont emprunté à 741 reprises, ce qui leur a permis d’exporter pour environ 35 milliards de dollars (environ 31,5 milliards d’euros) de marchandises, selon les données de Bloomberg. En 2024, 65% des exportations pétrolières russes ont été faites en passant par la mer Baltique. Et le spectre d’une marée noire consécutive à un accident inquiète les observateurs.
L’environnement, la clé pour bloquer le passage?
Bien que la convention de Copenhague de 1857 autorise un libre passage aux navires étrangers dans les eaux danoises et empêche les autorités d’intervenir sur le trafic maritime, la communauté internationale –y compris l’Union européenne– cherche des mesures pour mieux surveiller ces navires et réduire les risques environnementaux dans la région. Kristina Siig, professeure de droit maritime à l’université du Danemark du Sud, précise: «Le Danemark n’est pas un pays où l’on peut simplement mettre une barrière puis appliquer des sanctions envers les pétroliers russes. Mais s’il y a un moyen de le faire, c’est [en s’appuyant sur] la question environnementale.»
Some critics believe Denmark should be doing more to stop Russian oil. But a treaty dating back to 1857 that allows free passage for international ships in its waters has left Copenhagen toothless to stop the activity.
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— Bloomberg Graphics (@BBGVisualData) August 22, 2024
Plus d’un tiers des bateaux de la «flotte de l’ombre» sont âgés de plus de vingt ans. Ces navires risquent donc d’entrer en collision avec d’autres embarcations ou de déverser du pétrole dans la mer Baltique, qui est une zone particulièrement vulnérable. En 2001, après la collision entre un pétrolier et un cargo près de l’île de Møn (ouest du Danemark), une marée noire avait nécessité huit ans de nettoyage et tué près de 20.000 oiseaux. Si un nouvel incident de ce type se produit, les dommages écologiques seraient irréparables.
Tenu de guider les navires de cette «flotte fantôme», les pilotes de navire comme Mikael Pedersen doivent essuyer de nombreuses critiques. Certains les accusent de faciliter le commerce pétrolier russe malgré les sanctions internationales. Mais pour l’entreprise DanPilot, cette mission «relève de l’intérêt général» et permet de garantir un niveau minimal de sécurité maritime.
Néanmoins, Mikael Pedersen redoute qu’une fois la guerre russo-ukrainienne terminée, ces navires continuent d’emprunter ce parcours dans des conditions toujours aussi déplorables. «Je crains que cela crée un précédent que nous n’avons jamais vu auparavant», anticipe-t-il. En attendant, le monde continue de surveiller l’évolution de cette situation, la mer Baltique étant un terrain d’opérations risquées pour le commerce pétrolier.
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