Un exode qui renforce le déclin démographique du pays et va engendrer d’énormes problèmes économiques dans les prochaines années.
Alors que l’invasion de l’Ukraine déclenchée par la Russie en février 2022 dure depuis maintenant deux ans et demi, le principal défi pour l’économie russe n’est pas forcément celui que l’on croit. Certes, l’ensemble de la production est désormais tourné vers la guerre et les sanctions internationales ont un peu compliqué les exportations des hydrocarbures russes. Mais un problème plus grave la menace davantage à long terme: la fuite des cerveaux, explique Richard Portes, professeur d’économie à la London Business School, interrogé par le média économique américain Business Insider.
Au déclenchement de la guerre en Ukraine, un million de Russes ont fui le pays. Environ 86% d’entre eux avaient moins de 45 ans et 80% étaient diplômés de l’université, selon une note de juillet 2023 publiée par l’Institut français des relations internationales (IFRI). Nombre de ces exilés volontaires apparaissaient également fortunés: la Russie a perdu l’équivalent de 42 milliards de dollars (environ 38 milliards d’euros) après février 2022, lorsqu’ils ont déplacé leurs économies sous des cieux plus cléments –notamment sous le soleil de Dubaï.
Ces phénomènes s’additionnent en une «fuite des cerveaux» qui va poser un problème colossal sur le long terme. Et ce, alors que la Russie subit un important déclin démographique, aggravé par son invasion de l’Ukraine, où des dizaines de milliers de jeunes Russes ont déjà trouvé la mort.
Vers une tiers-mondisation de la Russie?
«Quelle que soit l’issue de la guerre, dans cinq ans, la Russie aura épuisé son capital physique, sauf dans le secteur de la défense, et aura perdu une énorme quantité de capital intellectuel et de capital humain, résume Richard Portes. […] Prenez quelqu’un qui a terminé ses études supérieures il y a dix ou quinze ans, qui invente quelque chose ou qui conçoit un logiciel. Vous ne pouvez pas remplacer quelqu’un comme ça par un nouveau diplômé.»
Quelques chiffres illustrent cette réalité. Il manquait près de cinq millions de travailleurs (majoritairement qualifiés) à la Russie en 2023. La productivité du pays a baissé de 3% l’année dernière, rapporte Business Insider. Enfin, le nombre de brevets déposés dans le pays a diminué de 13% en 2022 et de 30% pour les brevets déposés par des étrangers, selon les données de Rospatent, le Service fédéral de la propriété intellectuelle en Russie.
Pour ces différentes raisons, Moscou pourrait à terme «régresser», passant d’une économie «développée», avec une industrie forte, à une économie «sous-développée», reposant davantage sur l’exploitation de ses propres ressources naturelles. Avec pour conséquence une baisse du niveau de vie de la population, sachant qu’environ 20% des Russes ne disposent toujours pas de toilettes raccordées aux égouts…
Toutefois, à court terme, l’économie russe se porte très bien… mais à condition que la guerre en Ukraine se poursuive le plus longtemps possible. Ce qui n’incite pas vraiment Vladimir Poutine à siffler la fin de son «opération militaire spéciale» qui devait initialement durer trois jours.
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