La mondialisation des régimes alimentaires rend les pénuries d’autant plus effrayantes

C’est aussi la mondialisation : plus le temps passe, plus nos habitudes alimentaires convergent. Bloomberg explique cette standardisation par le fait que la culture occidentale prend de plus en plus de place dans le monde, mais aussi par l’augmentation d’une partie des salaires (oui, c’est bizarre à lire).

Conséquence purement logistique : nous sommes de plus en plus nombreux qu’auparavant à dépendre des importations. Tous les pays n’ont pas miraculeusement commencé à produire ce dont leur population avait besoin pour manger. Les échanges commerciaux se poursuivent et les changements d’habitudes alimentaires ont de lourdes conséquences sur les circuits de consommation.

Le blé est particulièrement touché par cette petite révolution des papilles et des estomacs. Produit par une poignée de pays, il est devenu un élément essentiel de l’alimentation de nombreuses personnes à travers le monde, quelles que soient leur culture et leur origine. Lorsque la Russie a envahi l’Ukraine, les prix du blé ont augmenté de 40 %, si bien que 20 pays ont décidé de limiter leurs exportations, déclenchant une série de réactions en chaîne dans le monde entier.

La guerre n’est pas la seule cause des fluctuations de prix et de disponibilité, rappelle Bloomberg : non seulement les conditions météorologiques variables (changement climatique obligatoire) jouent également un rôle, tout comme les variations de prix parfois impressionnantes de certaines devises. Il n’est pas surprenant que, comme si souvent, les pays les plus pauvres en subissent les conséquences.

Un monde instable

« Le fait de ne dépendre que de quelques cultures rend les gens plus vulnérables aux chocs »explique Fatima Hachem, spécialiste de la nutrition à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.

Les habitudes alimentaires ont évolué à une vitesse vertigineuse. Sur les 6 000 espèces de plantes consommées par l’homme depuis son arrivée sur Terre, seules 9 sont aujourd’hui régulièrement consommées et seules 3 (riz, blé et maïs) fournissent à l’humanité 50 % de ses calories. La consommation de viande et de produits laitiers a également explosé, le porc étant l’animal le plus populaire.

Des changements structurels peuvent expliquer ces changements profonds de nos habitudes alimentaires. Par exemple, au début des années 1960, la Chine était encore un pays pauvre et rural, et les changements rapides signifiaient qu’une grande partie de la population mangeait plus vite et différemment, achetait plus de produits transformés et avait moins de possibilités de se nourrir de ses propres récoltes.

« Il faut aussi être positif »tempère Colin Khoury, chercheur au Centre international d’agriculture tropicale. « L’expansion de la mondialisation des marchés agricoles a permis à des milliards de personnes de découvrir de nouvelles façons de se nourrir, auparavant limitées à des régimes extrêmement restreints. »

Néanmoins, cette convergence alimentaire a apporté une certaine instabilité aux circuits de consommation. En cas de récolte décevante ou de pic de prix, de nombreux pays peuvent soudainement se heurter à des pénuries inattendues. Avec, comme nous l’avons dit, un plus grand risque de blocage pour les pays les moins favorisés, qui sont souvent incapables de tirer les cordons de la bourse pour compenser des hausses importantes ou de surenchérir sur les concurrents des pays.