Grand Prix de Monaco 2014, ou le jour où Jules Bianchi a brillé. © Florent Gooden / DPPI L’homme était discret. Aux projecteurs des caméras de télévision qui déferlent dans le stand Marussia, il préférait l’anonymat des fidèles grognards qui l’accompagnent depuis 1990, ceux qui ont vu naître Manor Motorsport. Ces premiers vrais moments de joie, attendus depuis quatre ans et demi, c’est avec son équipe que John Booth voulait les savourer. « Ces points, c’est un soulagement, nous soufflait-il, alors que Damon Hill questionne Bianchi pour la chaîne britannique Sky Sports. Nous pensions que nous avions une chance ici, mais le problème de boîte, rencontré en qualif, et les cinq places de grille que s’ensuivirent rendaient la chose impossible. Jules a fait une course fantastique, sans rien lâcher, sans Jamais baisser les bras. C’est un pilote de très grande valeur. C’est pour cela que Ferrari l’a pris sous son aile. Il aura, mais ça, nous le savions déjà, une longue et belle carrière en F1. » Plus amène envers les médias que le solide John Booth, Graeme Lowdon, directeur général de l’écurie rebondissait sur les paroles de son patron. « Ces rues ont toujours honoré les plus grands pilotes et Je suis ravi qu’elles saluent aujourd’hui l’immense talent de Jules, assénait-il d’entrée. Il est toujours aisé de dresser des louanges à un pilote quand il vient de faire du bon boulot, mais ce qu’il a réussi est exceptionnel. Piloter ici réclame une belle dose de courage et d’intelligence. Il faut prendre les bonnes décisions, et elles ne furent pas toujours des plus limpides au cours des 78 tours. Jules a fait preuve de beaucoup de patience et de métier. Il a fait marcher sa tête et a été en mesure de tomber des chronos de tout premier ordre quand il le fallait. » Jules Bianchi, c’est vers lui que convergeaient tous les regards, que se tendaient les micros. Ils ne sont pas si nombreux, ceux qui se sont révélés sur cette piste pleine de pièges, où il n’est pas aisé de doubler. Lui y est parvenu, et de fort belle manière. « Ce fut plutôt chaud avec Kobayashi à la Rascasse mais je me suis dit que ça devait passer, soulignait-il alors que le Champion du monde 1996 lui rend sa liberté. Quand il a vu que j’étais là, il a refermé un peu, mais j’étais déjà à côté. Je n’ai pas réfléchi. J’ai vu l’ouverture et je me suis engouffré. J’allais plus vite que lui, mais je n’aurai pas retrouvé une telle opportunité. J’étais seulement une poignée de dixièmes plus rapide et si je n’avais pas saisi la chance à ce moment, Je serais resté derrière. » Une fois le pilote Caterham passé, le Varois gagnait encore un cran en termes de confiance. Après avoir effectué un début de course des plus brillants, qui lui avait permis de gommer le stop & go récolté pour ne pas s’être élancé depuis sa place de grille, il devenait absolument irrésistible mais ne tardait pas à apprendre qu’il était sous le coup d’une seconde pénalité. « Quand on m’a annoncé que je me reprenais un second stop & go, ça m’a un peu déconcentré mais je suis parvenu à me ressaisir. Surtout, je ne comprenais pas pourquoi. L’écurie m’a expliqué qu’elle s’était loupée en me faisant purger mes cinq secondes de pénalité lors de la neutralisation, mais que ça ne changeait pas le résultat et que nous étions toujours dans les points. Ça m’a rassuré. » Remonté jusqu’à la 10e place, le protégé de Nicolas Todt, gagnait encore deux places quand Kimi Raikkonen tentait une manœuvre suicidaire sur Kevin Magnussen au virage du Loews, dans le 73e tour. Jules Bianchi coupait la ligne à la 8e place, mais reculait d’un rang après le rajout de la pénalité de cinq secondes, puisqu’il n’avait pas effectué son stop & go. Une sentence des plus clémentes. « Depuis les essais libres du jeudi, nous savions que nous avions un bon rythme par rapport aux Sauber et nous espérions des points, car nous savions qu’il y a toujours des incidents lors de ce Grand Prix, concluait-il en ciblant ses prochains objectifs. Ce que j’ai fait aujourd’hui, c’est ce que je dois chercher à faire dès que l’opportunité se présente. Quand tu es dans une petite écurie comme Marussia, tu n’as pas le droit de laisser passer la moindre occasion de te mettre en valeur. Ça arrive une fois, peut-être deux dans une saison, mais pas plus. Il faut savourer l’instant et continuer à travailler. Il faut que nous nous servions de ce résultat comme d’un tremplin pour accélérer notre envol. Il n’est pas une fin en soi, mais est un commencement. L’écurie attend ça depuis un bon moment et ce n’est pas maintenant qu’elle va se relâcher. Nous mesurons le travail qui nous reste à faire pour devenir une écurie capable de marquer régulièrement des points. Quant à moi, pour être honnête, j’ai un peu de mal à réaliser… » Il suffit, là aussi, d’être patient. À LIRE AUSSI > Il y a 18 ans, Alonso résistait à la menace Schumacher à Imola 0
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