Alors que le Kremlin trouve « absurde » la théorie selon laquelle Moscou saboterait son propre gazoduc, l’ancien ministre polonais des Affaires étrangères Radek Sikorski a remercié les Etats-Unis pour les fuites de gaz à Nord Stream.
De leur côté, les gazoducs Nord Stream 1 et 2, qui relient la Russie à l’Allemagne, ont connu plusieurs fuites les 26 et 27 septembre pour une raison non identifiée. Alors que toutes les hypothèses sont à l’étude, Radek Sikorski, ancien ministre des Affaires étrangères de Pologne et eurodéputé, a simplement remercié… les Etats-Unis pour cette fuite de gaz. « Merci les États-Unis », a-t-il écrit dans un message du 27 septembre sur Twitter, accompagné d’une photo aérienne de l’incident.
Merci, États-Unis. pic.twitter.com/nALLYQ1Crb
— Radek Sikorski, député européen (@radeksikorski) 27 septembre 2022
Si ce message ne remplace manifestement pas une affirmation, ce commentaire a provoqué la colère de la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova.
L’ancien ministre polonais des Affaires étrangères, aujourd’hui membre du Parlement européen, Radek Sikorski, a remercié les États-Unis […] pour l’incident d’aujourd’hui sur le gazoduc russe (Nord Stream 2). Est-ce une déclaration officielle qu’il s’agit d’une attaque terroriste ? » a-t-elle demandé sur son compte Telegram le même jour.
La longue opposition de Washington à Nord Stream
En réponse à l’apparition de fuites au niveau de ces infrastructures critiques pour l’approvisionnement en gaz russe, les Etats-Unis avaient dit ne pas vouloir « spéculer » sur les causes de l’incident et dit vouloir soutenir leurs alliés européens sur la sécurité énergétique.
« Cela illustre l’importance de nos efforts conjoints pour trouver des sources alternatives d’approvisionnement en gaz pour l’Europe », a déclaré un porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, cité par l’AFP.
Si la Russie envahit les frontières de l’Ukraine, il n’y aura plus de Nord Stream 2. Nous y mettrons fin.
Au-delà de cette prise de position officielle, les Etats-Unis ont un historique d’opposition frontale à ce projet de gazoduc reliant la Russie à l’Allemagne. Outre la pression incessante pour que Nord Stream ne voie jamais le jour, le président américain Joe Biden n’a pas hésité à utiliser le registre des menaces en cas d’« invasion » lors d’une conférence de presse conjointe avec le chancelier allemand Olaf Scholz le 2 février. 7 de l’Ukraine à la Russie. Ainsi, dans ce clip récemment refait surface sur les réseaux sociaux au vu de l’actualité, le dirigeant américain soulignait : « Si la Russie envahit les frontières de l’Ukraine, il n’y aura plus de Nord Stream 2. Mettons-y fin. »
En répondant à la question du journaliste demandant comment les États-Unis comptaient faire, sachant que le projet est sous le contrôle de l’Allemagne, le président américain a affirmé avec perplexité : « Je vous promets que nous pouvons le faire.
« Nous allons terminer #NordStream2 si la Russie envahit les frontières de l’Ukraine », a-t-il dit @Joe Biden le 7 février 2022. #Russie#Ukraine#Nordstreampic.twitter.com/Tkqf0KZG5u
— Tamila Tapayeva (@tamilatapayeva) 27 septembre 2022
Moscou juge « absurde » l’hypothèse de l’auto-sabotage
Du côté de Moscou et des chancelleries occidentales, aucune hypothèse n’est exclue. Interrogé sur la possibilité d’un sabotage – d’où qu’il vienne -, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a répondu le 27 septembre : « De toute évidence, il y a une sorte de dysfonctionnement […]mais il est impossible d’exclure quoi que ce soit avant les résultats [de l’enquête] ne sont pas disponibles. » Et de souligner que l’exploitation de Nord Stream 1 était une question de « sécurité énergétique du continent » [européen] ensemble ».
Dmitri Peskov a de nouveau qualifié le sujet lors d’une conférence de presse le lendemain d' »absurde », la théorie défendue par certains qui attribuent à Moscou le sabotage de ses propres infrastructures. Le porte-parole a trouvé cela « prévisible », mais pas moins « bête », soulignant que les fuites étaient « problématiques » pour la Russie elle-même, ajoutant : « Les deux tubes sont remplis de gaz (russe) prêt à être pompé, et ce gaz est très cher… Maintenant que le gaz s’échappe. Cette déclaration est intervenue après que le conseiller de la présidence ukrainienne, Mykaïlo Podoliak, a affirmé, sans aborder aucune preuve, « un attentat terroriste planifié » par Moscou.
Sur les différentes hypothèses sur la table, Dmitri Peskov a encore commenté : « Avons-nous un intérêt là-dedans ? Non, nous n’en avons pas. Nous avons perdu les routes du gaz vers l’Europe. L’Europe s’y intéresse-t-elle, notamment l’Allemagne, moteur de l’économie européenne ? Non. Eux aussi sont dans une situation très difficile aujourd’hui. Non seulement ils paient maintenant un lourd tribut pour leurs décisions à courte vue, mais je parle de ces sanctions endémiques. Mais elles se trouvent aussi aujourd’hui dans une situation extrêmement difficile quant au développement global futur de leur industrie, à sa rentabilité et à sa compétitivité. Dès lors, de nombreuses questions se posent. »
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a pour sa part écrit sur Twitter dans la soirée du 27 septembre qu’elle s’était entretenue avec la Première ministre danoise Mette Frederiksen au sujet de l’acte de sabotage du Nord Stream.
« Il est essentiel d’enquêter sur les incidents et de faire toute la lumière sur les événements […] Toute perturbation délibérée de l’infrastructure énergétique active de l’Europe est inacceptable et déclenchera la réponse la plus forte possible », a ajouté Ursula von der Leyen.
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