Les conclusions d’une équipe de recherche internationale créent la polémique au sein de la communauté scientifique.
Après avoir examiné plus d’une centaine de restes humains momifiés de la culture péruvienne Chancay (qui s’est principalement développée entre le XIIIe et le XVe siècle de notre ère), des chercheurs viennent de publier les résultats de leurs recherches, dans une étude parue le 13 janvier dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS). Le média en ligne Live Science, qui s’est intéressé au fruit de leurs travaux, en dresse un résumé fascinant, d’autant plus que l’étude est contestée.
Principalement constituée d’archéologues basés aux États-Unis, à Hong Kong, au Pérou et en Pologne, l’équipe de recherche a eu recours à une technique connue sous le nom de fluorescence induite par laser (ou imagerie LIF). Celle-ci permet de produire des images fondées sur la fluorescence d’un échantillon et permet ainsi de révéler des détails qu’un simple examen à la lumière ultraviolette (UV) pourrait ne pas suffire à mettre en valeur.
L’imagerie LIF fonctionne en donnant à la peau un aspect fluorescent. De celle-ci, qui semble alors d’un blanc éclatant, ressort clairement l’encre noire des tatouages, à base de carbone. De cette façon, même les tatouages qui se sont estompés au fil du temps réapparaissent de façon résolument nette.
«Trois de ces individus présentaient des tatouages très détaillés, constitués de fines lignes de seulement 0,1 à 0,2 millimètre d’épaisseur, qui ne pouvaient être vus qu’avec notre nouvelle technique», déclare Michael Pittman, paléobiologiste à l’Université chinoise de Hong Kong et coauteur de l’étude, interrogé par LiveScience. Les trois tatouages retrouvés sur ces momies étaient «principalement des motifs géométriques comportant des triangles, que l’on retrouve également sur d’autres supports artistiques Chancay comme la poterie et les textiles», poursuit-il.
Pérou: Une nouvelle technique laser aurait révélé des détails complexes sur des tatouages de momies appartenant à la culture Chancay (environ 900 à 1533 après J.-C) https://t.co/jxZWJReu3H pic.twitter.com/TqRfHS9tgU
— Bernadette Arnaud (@NarudaaArnaud) January 13, 2025
Un côté «Game of Thrones»
La culture Chancay, qui s’est développée le long du littoral central du Pérou, au cours de la deuxième partie du Moyen Âge (entre 1200 et 1500 après J.-C.), est surtout connue pour ses céramiques et ses textiles noir sur blanc, comme l’explique Kasia Szremski, archéologue à l’Université de l’Illinois à Urbana-Champaign, qui n’a pas participé à l’étude. Les Chancay étaient «un peu comme la maison Frey de la série Game of Thrones», avance la scientifique à Live Science: «Ils attendaient la fin de la guerre entre Chimús et Incas [vers 1470], jusqu’à ce qu’ils puissent voir qui avait l’avantage et rejoindre le camp gagnant.»
On sait peu de choses sur l’organisation sociale de la civilisation Chancay. Selon Kasia Szremski, c’est justement ce qui rend l’étude intéressante et importante. «Dans de nombreuses sociétés, les tatouages sont utilisés pour marquer les personnes ayant un statut particulier, précise-t-elle. En comprenant mieux à quoi ressemblent les tatouages de la culture Chancay, nous pouvons commencer à rechercher des motifs qui peuvent nous aider à identifier différents types, classes ou statuts de personnes.»
L’étude en question fait cependant l’objet d’une polémique et de contestations. Aaron Deter-Wolf, expert en tatouages anciens au sein de la Division d’archéologie du Tennessee (une agence gouvernementale de cet État américain), avance y avoir relevé plusieurs erreurs. Il s’oppose notamment à la conclusion, dans laquelle il est affirmé que deux des tatouages retrouvés ont été créés grâce à la technique aujourd’hui connue sous le nom de «handpoke», qui consiste à tatouer point par point.
Selon Aaron Deter-Wolf, les tatouages auraient été créés en incisant de courtes lignes parallèles dans la peau, avec des pigments frottés à partir de la surface. Il se dit «consterné» par certaines parties de l’étude, dont il estime qu’elle «n’apporte pas de contribution significative à la compréhension actuelle des anciennes pratiques culturelles andines». On attend la prochaine étape du clash.
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