Et si Washington en avait appris plus sur Pékin que l’inverse ?
L’affaire, le premier week-end de février, a fait grand bruit et les grands échos se font encore entendre. Un ballon de surveillance chinois, plus espion que météorologue, a passé des jours à survoler le sol américain et des installations sans doute très sensibles.
Avant qu’un deuxième ballon de même origine ne soit découvert au-dessus de l’Amérique latine, ce premier missile a été abattu depuis un missile AIM-9X Sidewinder lancé au large de la Caroline du Sud par un F-22 « Raptor ».
Soi-disant le moment où le ballon chinois a été sorti. pic.twitter.com/DSKT1nGLgf
— Seveer des 95e canons 🇺🇦🇬🇧 (@Severity) 4 février 2023
C’est évidemment extrêmement embêtant, d’autant que le revers critique intervient à un moment donné entre la Chine et les Etats-Unis, qui oscillent entre de vives tensions autour de Taïwan et dans le Pacifique, des révélations sur le soutien discret de la Russie dans sa guerre contre l’Ukraine, et des timides envie de rafistoler les choses.
Aux États-Unis, les républicains ont sauté sur l’affaire pour critiquer vertement Joe Biden, accusé de laxisme ou de réponse trop lente à cette agression restée sans nom, alors même que l’administration Trump a elle aussi connu le même genre d’incursion.
Son gouvernement a fait valoir des raisons de sécurité logiques pour justifier le report de l’abattage du ballon chinois : des débris pourraient tomber sur des populations ou des installations au sol, ou encore perturber et mettre en danger le trafic aérien.
Plus important encore, The War Zone nous apprend que le temps que nous avons passé à faire planer l’appareil au-dessus du territoire américain a été utilisé pour quelque chose de complètement différent, selon les informations des officiers du Pentagone.
Les États-Unis ont ainsi lancé deux avions espions, U-2 « Dragon Lady », pour se positionner au-dessus du ballon espion pour l’épier, l’analyser et le disséquer sous toutes ses coutures.
Une façon pour le pays d’en apprendre beaucoup sur le genre d’informations que Pékin tente de récolter avec ses aérostats, avant même (peut-être) que les débris de la chose ne soient retrouvés dans l’océan Atlantique.
Audio de FRANK01 (Langley AFB F-22) appelant « SPASH ONE » et confirmant à « HUNTRESS » (Eastern Air Defence Sector « EADS ») que le #ChineseSpyBalloon a été complètement détruit aujourd’hui au large de la Caroline du Sud 😎
*Un grand merci à 📷Brett728 pour le partage des photos et 🕵️♀️ pour l’audio ! pic.twitter.com/8tfZeyeNAy— Thenewarea51 (@thenewarea51) 5 février 2023
Ainsi est pris celui qui a cru prendre
Utiliser le U-2 « Dragon Lady » à cette fin prend tout son sens : conçu par Lockheed Martin, le célèbre avion espion à l’envergure démentielle est le seul appareil américain (« Pour tout ce que nous savons »ajoute The War Zone) capable d’atteindre une altitude suffisante (environ 22 000 pieds) pour une telle mission.
Pourquoi avez-vous besoin d’un avion capable de survoler le ballon chinois ? D’abord pour observer ce qui aurait pu se cacher dans l’enveloppe, mais aussi et probablement surtout pour analyser d’éventuelles communications qui pourraient être envoyées entre l’aérostat et les satellites militaires chinois, avant d’être envoyées à Pékin.
Car en termes d’analyse, le U-2 sait et peut tout faire, explique The War Zone. Dotée d’une infinité d’instruments, d’appareils et de capteurs aux multiples spécialités, personnalisables selon les missions grâce à un système de « pods » interchangeables, la « Dragon Lady » peut prendre des photos, le faire par tous les temps, le faire en infrarouge, analyser tous types d’ondes radar et de communications électroniques transmises ou reçues, etc.
Conclusion : Si le ballon apparaît à première vue comme un objet mystérieux aux missions sibyllines, il est fort possible que les U-2 envoyés par le NORAD pour le chasser l’aient suffisamment disséqué, sous toutes les coutures, pour qu’il n’en ait plus beaucoup secrets du gouvernement américain.
C’est d’autant plus important que, si cette affaire fait grand bruit, elle est loin d’être une première pour les Etats-Unis – et pour les grandes nations en général, qui s’espionnent depuis que l’espionnage existe.
Chaque année, de nombreuses rencontres avec de mystérieux objets volants non identifiés sont signalées par des pilotes américains – ils sont officiellement nommés « phénomènes aériens non identifiés » ou UAP, et sont étudiés par une « Task Force » spéciale.
Ces rassemblements de 3e type, qui ont récemment fait l’objet d’un rapport de police, ne le sont généralement pas : il peut s’agir d’objets destinés à l’espionnage mais qui n’ont jamais été découverts auparavant, et l’aérostat est très fréquemment mis en cause.
Ce fut le cas, par exemple, d’étranges « cubes en ballons » rencontrés en 2019 par des pilotes de l’US Navy quelque peu ahuris. Selon The War Zone, il ne s’agissait a priori pas d’objets venus de l’espace, mais d’appareils destinés à tester les défenses aériennes américaines, notamment les capacités radar du pays.
Comprendre ce que les autres veulent comprendre est donc crucial : c’est aussi ainsi que les lacunes de ses propres défenses peuvent être appréhendées et, si nécessaire, comblées. Joe Biden n’a donc probablement pas été à la traîne dans sa réaction au ballon chinois : il a probablement pris tout le temps dont ses U-2 avaient besoin pour réussir le tour de l’arroseur arrosé par Pékin.
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